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Les paysages des peintres et des écrivains

Le regard que les artistes ont porté sur les paysages, les émotions qu’ils y ont associées, ont participé incontestablement à l’émergence de l’identité alsacienne.
La peinture et la gravure ont montré surtout une Alsace pittoresque dont la montagne, les ruines, la ville sont les principaux motifs. Les écrivains ont trouvé, lors de leurs voyages ou séjours en Alsace, de Strasbourg en ruines médiévales en passant par les bourgs pittoresques, un substrat pour leurs chroniques, leurs écrits romantiques ou encore leur foi patriotique. Ces œuvres très souvent reprises par les guides touristiques, participent encore aujourd’hui à l’imaginaire des paysages alsaciens. Si l’ensemble de ces références est certes riche et fécond, l’absence ou le manque de visibilité de représentations artistiques contemporaines pose la question de leur renouvellement.

Les paysages de la peinture et de la littérature

« On a souvent dit que l’Alsace n’avait pas inspiré les peintres et il est vrai que les grands artistes qui l’ont traversée n’en ont pas tiré des toiles notables, comme c’est le cas, entre autres, d’Eugène Delacroix, qui d’ailleurs s’en explique : « Je traverse l’Alsace, la Lorraine, la Champagne. Rien ne me parle dans tout cela. » Mais dans le cas de Delacroix, ses voyages en Alsace correspondent à une époque où il est souffrant et on pourrait presque parler de rendez-vous manqué d’un artiste alors peu disponible.
Cette désaffection des peintres célèbres pour l’Alsace est par ailleurs assez difficile à comprendre dans la mesure où la région est très pittoresque et a nourri l’imaginaire de bien des lithographes. Cela dit, de nombreux artistes moins connus, souvent Alsaciens d’origine, ont peint la région
. »

Catherine Jordy, Aime-t-on la peinture en Alsace ? Le Portique [En ligne], 10, 2002,
http://leportique.revues.org/index1...

Des peintres peu connus pour des paysages pittoresques et sublimes

Peu de « grands peintres » ont donc représenté l’Alsace. Ici, pas de Van Gogh, de Monet, de Signac… pour rendre visibles, au-delà des frontières régionales, des paysages qui, pourtant, ne manquent pas d’éléments de sublime et de pittoresque. Les représentations des paysages alsaciens sont surtout le fait d’artistes moins connus, ancrés dans leur région d’origine. L’exposition montée par le musée d’Unterlinden à Colmar en 2011, qui s’est attachée à faire le point sur la production de peinture de paysage de 1780 à 1870, a été en cela un événement. Les visiteurs ont pu ainsi découvrir les sites qui avaient inspiré les artistes du XIXe siècle et la manière dont était née cette Alsace pittoresque qui influence encore notre regard aujourd’hui.

Dans cette production, les ruines d’églises, d’abbayes et de châteaux, les abords des cours d’eau et les paysages de montagne où abondent rochers abrupts, cascades et lacs, dominent. Plus tard, si les Impressionnistes ne se sont pas penchés sur le berceau alsacien, ils ont cependant inspiré des artistes comme Georges Daubner, Lothar von Seebach, Paul Weiss… qui ont planté leurs chevalets en « plein air » et adopté une palette plus claire et plus lumineuse. Le sublime et le pittoresque sont délaissés au profit de motifs plus intimes de bords de cours d’eau, de campagne, de sous-bois ou de chemins. Ce faisant ils ont porté leur regard sur des paysages moins stéréotypés où le vent, la couleur, le mouvement contribuent à ressentir davantage les ambiances qu’à voir les paysages alsaciens.

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Les principaux sites alsaciens représentés par la peinture
Sources : L’alsace pittoresque : l’invention d’un paysage, 1770-1870, musée Unterlinden, Hazan, 2011 ; Saisons d’Alsace, DNA, automne 2004, Bases Joconde, Gallica, RMN, Bibliothèque nationale de Strasbourg.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Les peintres se sont, sans surprise attachés aux sites les plus pittoresques : les montagnes, les ruines, les principaux sites patrimoniaux. Les villes et leurs abords sont également présents dans les représentations.

 

 

 

 

 

 

 

La montagne, « le » sujet de paysage

Le catalogue de l’exposition de 2011 L’alsace pittoresque : l’invention d’un paysage, 1770-1870 du musée Unterlinden de Colmar montre, par la place qui lui est consacrée, que la montagne constitue le principal sujet d’inspiration des artistes du XIXe siècle. Cette place est aussi importante dans la littérature.

Les beautés d’un paysage naturel et sublime

« En quittant Retournemer, on monte à travers la forêt le chemin des Dames qui conduit au col de la Schlucht. Arrivé là, on est bien payé de sa peine, si l’on peut appeler peine une excursion à travers un pays accidenté et charmant. Un immense panorama se déploie, à vos yeux. De cette élévation, vous dominez un horizon sévère et grandiose. A la gauche de la route conduisant a la vallée de Munster, s’escarpe une abrupte montagne granitique dont les crêtes se déchiquettent comme les créneaux démantelés d’une forteresse en ruine. D’énormes blocs croulent sur les pentes, et à un endroit, un rocher gigantesque obstrue le chemin taillé au flanc delà montagne ; il a fallu le percer et il forme, ainsi évidé, une sorte d’arche de pont ou de porche colossal qui nous a rappelé le fameux défilé de Pan-Corvo, en Espagne, près de Burgos. Au delà de la route, le terrain s’abîme presque à pic vers le fond d’un précipice boisé çà et là de sapins qui d’en haut semblent des plaques de mousses. »

Théophile Gautier, Les Vacances du lundi, 1884.

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Jean-Nicolas Karth, Paysage de la Schlucht, le 24 août 1851 à 10-11 heures
Bibliothèque nationale universitaire de Strasbourg

La route vers le col de la Schlucht construite ex nihilo par des industriels mulhousiens à partir de 1848 s’empare ici de la raideur du versant où affleurent des roches déchiquetées. Cette image polysémique montre à la fois le sublime et l’inhospitalité de ces paysages des Hautes-Vosges et la faculté de l’homme de s’affranchir de cette contrainte. Les tons froids (bleus, mauves, violets) choisis par l’aquarelliste ajoutent encore de la dureté au paysage naturel.

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Benjamin Zix, Chute d’eau de Soulzbach, 1805
Bibliothèque nationale universitaire de Strasbourg
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L. C. Oppermann, La Cascade du Nideck, août 1817
Bibliothèque nationale universitaire de Strasbourg

Les cascades font partie des attributs de la nature que la peinture paysagiste du XVIII et du XIXe siècle affectionne particulièrement. Dans ces représentations des peintres et illustrateurs B. Zix et L.C. Oppermann, les cascades et les versants escarpés symbolisent la nature indomptée de la montagne. Ils sont néanmoins rendus plus proches par la présence des baigneuses dans le tableau de Benjamin Zix et par les promeneurs dans celui de L.C. Oppermann qui se trouvent à leurs pieds. Davantage allégories que paysages, ces images n’en représentent pas moins le nouvel attrait des artistes de l’époque pour la montagne et ses beautés.

Les ruines : romantisme et histoire

« Des maisons mal alignées, grises, même un peu lépreuses et qui semblent écrasées par le poids d’un toit démesuré, d’un toit fait de grosses tuiles noirâtres. Des rues tortueuses, étroites, sur lesquelles se penchent des pignons déjetés, s’avançant un peu plus à chaque étage, si bien que le faite des maisons semble se toucher. Pas de trottoirs, des ruisseaux suspects, malodorants. On se sent, comme étouffé, on craint de manquer d’air,
on relève la tète. Oh ! Alors, on s’arrête béant, car ce qu’on aperçoit est merveilleux. Tout là-haut, là-haut, dans une sorte de vapeur bleuâtre, nimbées de lumière, apparaissent splendides, les ruines du château de Saint-Ulrich. Un instant, on se demande si on n’est pas le jouet de quelque illusion, car, enfin, c’est trop beau. On dirait un de ces lointains, d’un pittoresque exagéré, qui, dans quelques opéras-comiques, servent de décor de fond à une fête villageoise. On se dit : « C’est charmant, mai pas naturel ; jamais on n’a juché un château si haut... Et puis ces ruines sont trop artistiquement disposées. » Eh bien ! Allez à Ribeauvillé, je ne vous dis que cela ! Oui, vous verrez quelque chose de bien plus impressionnant que les ruines trop vantées du bord du Rhin, de Mayence à Cologne, lesquelles se dressent, en général, sur des collines de faible élévation, en premier plan et sont complètement enveloppées d’échalas en longues files, ce qui n’est pas poétique
du tout. Impossible de rêver : on est trop près ! Tandis qu’à Ribeauvillé, le château de Saint-Ulrich semble flotter entre ciel et terre. On a ici l’impression, non d’une réalité tangible, mais d’une vision fantastique qui va s’évanouir dans les nuages...
 »

Masson-Forestier, Forêt-Noire et Alsace : notes de vacances, Hachette, 1904

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Henri-Charles Mueller, Luetzelbourg près Phalsbourg
in : Album de H.-Ch. Mueller, Souvenirs pittoresques des Vosges, environs de 1820
Bibliothèque nationale universitaire de Strasbourg
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Benjamin Zix, Château de la Roche, 1795
Bibliothèque nationale universitaire de Strasbourg

Les ruines perdues dans la montagne sont un des sujets de prédilection des peintres paysagistes alsaciens de la fin du XVIIIe et du XIXe siècle. En grand angle ou peintes dans leurs détails, les ruines, ici associées à la montagne, sont porteuses d’un imaginaire très fort. Ces visions purement romantiques ont amplement contribué à façonner les images mentales des paysages alsaciens. Aujourd’hui encore, la photographie, qu’elle soit le fait d’amateurs ou de professionnels, fait du patrimoine défensif du Moyen Age un sujet récurrent des représentations alsaciennes avec, pour seule différence, un attrait moindre pour les ruines que pour les reconstitutions.

La montagne – presque – domestiquée
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Louis Schneegans, Paysage entre Rothau et Naswiller, XIXe siècle
Bibliothèque nationale universitaire de Strasbourg

Une vue apaisée des montagnes vosgiennes. A l’arrière-plan, la forêt bleutée et moutonnante recouvre complètement les reliefs. Elle crée un contraste saisissant avec le premier plan ouvert rassemblant les éléments bucoliques : une chaumière qui fume, un pré où paissent tranquillement deux vaches, un chemin bien entretenu que parcourent des paysans. La masse de la lisière forestière aux arbres finement exprimés vient ajouter la seule ombre à ce paysage peigné et joyeux dont la force tient à l’opposition entre le paysage fermé et hostile de la montagne et l’aménité de la nature domestiquée par l’homme.

La plaine, vue de loin et de haut

La plaine, très rarement représentée en tant que telle par les artistes, est souvent vue de loin, quand le panorama l’offre au regard dans le cadrage des montagnes à l’horizon ou quand elle se découvre à partir d’un promontoire.

«  J’étais descendu à l’Auberge du Saint-Esprit ; et je courus aussitôt, afin d’apaiser mon plus ardent désir, à la cathédrale, que mes compagnons de voyage m’avaient déjà montrée depuis longtemps et qui était demeurée devant mes yeux pendant toute la durée du trajet. (…)
Et je vis donc de la plate-forme, devant moi, la belle contrée où j’allais séjourner et demeurer quelque temps, la ville considérable, les prairies étalées au loin alentour, garnies et entremêlées d’arbres magnifiques et serrés, cette richesse frappante de la végétation, qui, suivant le cours du Rhin, dessine des îles et les rives. Non moins décoré d’une verdure diverse, s’étend vers le sud le terrain plat qu’arrose l’Ill ; même, à l’ouest, vers les montagnes, se trouvent quelques bas-fonds qui offrent un aspect aussi ravissant de bois et d’herbe ; tandis que du côté nord, plus inégal, est coupé d’innombrables petits ruisseaux qui favorisent partout une prompte végétation. Que l’on imagine maintenant entre luxuriants herbages répandus, entre ces bois agréablement dispersés, tout ce pays propre à la culture, parfaitement cultivé, verdoyant et mûrissant, les emplacements les meilleurs et les plus riches marqués par des villages et des métairies, et cette vaste plaine, à perte de vue, si bien préparée, comme un nouveau paradis, pour les humains, bornée de près et de loin par des montagnes, les unes cultivées, les autres boisées, et l’on comprendra le ravissement avec lequel je bénissais le destin qui m’avait assigné pour quelque temps un si beau séjour.
 »

Goethe, Souvenir de ma vie, Poésie et vérité, Aubier, 1991

Premier plan des panoramas sur les Vosges…
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J. N. Karth, Kolbsheim, Environs, Vue générale, 1877
Bibliothèque nationale universitaire de Strasbourg

Le sujet n’est pas ici vraiment la plaine mais le « profil » des Vosges. Mais pour mettre en valeur la ligne du relief, l’artiste représente dans un vaste premier plan, le paysage de la plaine que le cours d’eau, le chemin, la lisière boisée et les arbres parsemés animent.

.. ou regardée parfois pour elle-même

« Octobre. Le houblon est cueilli, le maïs se dore au soleil tardif sous le toit des granges, le tabac par larges feuilles pend dans les séchoirs, le vin nouveau bougonne dans les cuves. Les hirondelles vont partir, le nid de la cigogne est vide. Dressant dans l’air bleu ses peupliers dont les feuilles les plus hautes bougent à peine dans le courant invisible d’une brise dormante, traversée d’eaux silencieuses, la plaine d’Alsace étale son opulence somnolente depuis les Vosges où commence à sonner la cognée du bûcheron jusqu’au Rhin vert et musclé  ».

Jean-Paul de Daldesen, Goethe en Alsace, Le temps qu’il fait, 1995

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Auguste Riesler, Les enfants de l’asile agricole de Cernay
Strasbourg, Cabinet des Estampes et des Dessins, sd
Image n. 153 du catalogue Alsace pittoresque
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Henri Zuber, Les premiers sillons ; Haute Alsace, dit aussi le laboureur, 1883
RMN-Grand Palais (musée d’Orsay) / Hervé Lewandowski

Deux représentations assez rares de la campagne alsacienne.
A gauche, Auguste Riesler dessine, près de Cernay, entre Piémont et plaine mulhousienne, un grand champ où des enfants, des orphelins viennent faucher les foins. La plaine est à peine fermée au loin par une esquisse de collines en partie masquée par un grand bâtiment (une usine ?) que l’on devine sans grand caractère. Les usines et leurs cheminées fumantes, le village à l’arrière-plan dont on distingue à peine le clocher, dessinent un paysage sans relief ni élément remarquable. Un paysage banal – la représentation d’orphelins en est peut-être la raison –sans doute proche de la réalité du XIXe siècle.
A droite, Henri Zuber, peint lui aussi un grand champ, mais dans une facture différente. Le champ que clôt au loin un village dont seul émerge le clocher, est empli par la présence du laboureur et de sa charrue que tirent deux bœufs. Le ciel qui occupe les trois quart de l’espace de la toile signe l’identité de ce paysage de plaine alsacienne.

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Alphonse Chuquet, Plaine, environs de Sélestat, XIXe siècle
Bibliothèque nationale universitaire de Strasbourg

Cette image dessine une plaine débarrassée des éléments du pittoresque. La ligne fermant le paysage n’est plus celle des Vosges, mais celle des peupliers que l’on imagine longer un cours d’eau.

La plaine et le Rhin

« Vous savez, je vous l’ai dit souvent, j’aime les fleuves. (…) Et, je vous l’ai dit aussi, entre tous les fleuves, j’aime le Rhin. La première fois que j’ai vu le Rhin, c’était il y a un an, à Kehl, en passant le pont de bateaux. La nuit tombait, la voiture allait au pas. Je me souviens que j’éprouvai alors un certain respect en traversant le vieux fleuve. J’avais envie de le voir depuis longtemps. Ce n’est pas sans émotion que j’entre en communication, j’ai presque dit en communion, avec ces grandes choses de la nature qui sont aussi de grandes choses dans l’histoire. (…)
Ce soir-là, quand je vis le Rhin pour la première fois, cette idée ne me dérangea pas. Je contemplai longtemps ce fier et noble fleuve, violent, mais sans fureur ; sauvage, mais majestueux. Il était enflé et magnifique au moment où je le traversais. Il essuyait aux bateaux du pont sa crinière fauve, sa barbe limoneuse, comme dit Boileau. Ses deux rives se perdaient dans le crépuscule. Son bruit était un rugissement puissant et paisible. Je lui trouvai quelque chose de la grande mer
 ».

Victor Hugo, le Rhin, 1842

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Alphonse Chuquet, Alsace, bords du Rhin, XIXe siècle
Bibliothèque nationale universitaire de Strasbourg
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L. Boeshens, Vue prise du Pickelstein : La forêt du ’Fioret’, Pfaffenhoffen et la plaine du Rhin
Bibliothèque nationale universitaire de Strasbourg

Ambiances impressionnistes

Certains peintres alsaciens ou allemands, à la fin du XIXe et au début du XXe siècles, sont influencés par le mouvement impressionniste. Leurs paysages ne s’intéressent plus aux attributs pittoresques, sublimes ou romantiques. Les œuvres relèvent davantage les ambiances que les paysages eux-mêmes. Leurs palettes claires, leurs manières moins apprêtées, rendent possible un nouveau regard sur les paysages alsaciens.

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Lothar von Seebach, Paysage du Ried avec saules
in : Lumières impressionnistes sur l’Alsace, in Saisons d’Alsace, n°24, automne 2004.

Le paysage que peint ici l’artiste impressionniste est caractéristique du Ried traditionnel : prairies humides bordées de roseaux, de haies, de lignes d’arbres et de petits massifs boisés : une esquisse de bocage d’où émergent ça et là quelques saules-têtards.

Les villes

Les cités alsaciennes ont été très tôt représentées par la gravure. Les images sont nombreuses et présentent la caractéristique d’y associer souvent la campagne alentour. Ainsi la ville est souvent représentée dans son site.

Les villes dans leur paysage

« A mi-chemin entre Colmar et la Schlucht, voici la riche petite ville industrielle de Munster. Avant d’y arriver, sur la hauteur de gauche, apparaît joliment campée, une ruine, propriété des Hartmann, les marquis de Carabas de la vallée. Nous y sommes allés de Munster voir le panorama qui s’offre aux regards et qui, certes, est ravissant. (…)
Rien de gracieux comme l’entrée dans Munster, à travers un joli square très touffu avec des arbres qui se couchent sur la route et font comme un dôme au-dessus de la chaussée. Nous avons séjourné huit jours dans ce joli endroit où la vie n’est point chère, et je le recommande aux touristes. A coup sûr ce n’est pas la campagne, mais la campagne est à dix pas et les excursions de montagne abondent de toutes parts.
 »

Masson-Forestier, Forêt-Noire et Alsace : notes de vacances, Hachette, 1904

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Mulhouse, Vue générale, XVIIe siècle
In : Ausfuehrliche und Grundrichtige Beschreibung der Herzogthuemer Lottringen und Savojen, des Obern und Untern Elsasses...
Bibliothèque nationale universitaire de Strasbourg

Datant du milieu du XVIIe siècle, cette gravure met en scène Mulhouse dans son territoire. Ainsi, la ville, en s’inscrivant dans le paysage, en devient une composante au même titre que les montagnes ou les vergers dessinés au premier plan.

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Wissembourg, 1761
In : Johann Daniel Schoepflin, Alsatia illustrata Germanica, 1761
Institut national d’Histoire de l’Art (INHA), Paris, collection Jacques Doucet
Source en ligne http://www.purl.org/yoolib/inha/8806
Bibliothèque nationale universitaire de Strasbourg

Ces deux représentations de Wissembourg (le vieux et le neuf) font toutes les deux une large part au paysage dans lequel la ville s’inscrit. Le modelé du relief, les motifs que font les parcelles de culture, les arbres qui animent ça et là la campagne, tout est soigneusement représenté. Un regard lointain, détaché mais qui s’attache à la valeur de l’agencement des composantes (la ville, les reliefs, les silhouettes des arbres, le dessin des cultures…).

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Henri-Charles Mueller, Mutzig, Vue générale, 1820
Bibliothèque nationale universitaire de Strasbourg

Cette manière de représenter la ville du début du XIXe siècle n’est guère différente de celle du siècle précédent. Le point de vue est sensiblement le même, surplombant. La ville apparaît cependant plus lointaine, le dessinateur ayant privilégié le regard sur la campagne sillonnée par une rivière sans vallée.

Les villages : rues et colombages

Les villages sont représentés, chez des artistes ou illustrateurs de talent comme Charles Spinler ou Henri Loux, dans leurs caractères traditionnels. Le village alsacien – les deux illustrations qui suivent ne sont pas localisées précisément - est ainsi fait d’une rue que bordent des maisons à colombage. Aujourd’hui, en couleur et avec les géraniums en plus, le bourg ou le village alsacien sont toujours représentés avec ces mêmes attributs.

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Charles Spindler, Rue de village, photo d’une marqueterie, début du XXe siècle
Bibliothèque nationale universitaire de Strasbourg
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Henri Loux, Hiver, début XXe siècle
Bibliothèque nationale universitaire de Strasbourg
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Henri Loux, Sessenheim, Vue partielle, début XXe siècle
Bibliothèque nationale universitaire de Strasbourg

Dans ce montage de vues de Sessenheim, des éléments d’architecture et de patrimoine représentent la ville. Cette illustration, sorte de carte postale, est dans la ligne des images multivues qui, à partir du début du XXe siècle, recensent une grande partie des bourgs et des villages alsaciens. Ces dernières cependant mettent souvent au centre, dans la tradition de la gravure ancienne, le panorama du village dans son paysage.