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Dynamiques et enjeux paysagers dans la Hardt

DYNAMIQUES PAYSAGERES DANS LA HARDT

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Hardt minute de la carte d’état-major IGN 1830
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Hardt photo aérienne IGN 1951
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Hardt photo aérienne IGN 2010

Une mutation agricole qui transforme radicalement le paysage dans l’après la guerre

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Petit Landau et Hombourg en 1946 (source : Alsace atlas aérien de la France. Gallimard 1964) : Le parcellaire forme une marquetterie de micro parcelles en lanières. Les arbres fruitiers sont omniprésents, composant un paysage à la fois cultivé et arboré.

La structure parcellaire de la Hardt agricole des années 50 témoignait de son mode de conquête par le défrichement. Les chemins de la Basse terrasse forment un dessin régulier et se recoupent à angle droit. Le parcellaire est régulier et typique de I’openfield : en lamelle de parquet. En 1953 le système de culture était dominé par le labour. Dans l’ouest de la Hardt, aux sols pauvres la céréaliculture ne dominait que dans les communes situées entre la forêt et le Rhin où la présence d’alluvions récentes leur permettait d’associer céréaliculture et plantes fourragères.
Le parcellaire en lanière dominant jusqu’aux années cinquante s’est drastiquement simplifié en s’adaptant à la traction mécanisée et aux exigences de la maïsiculture irriguée. Les lignes de fruitiers qui s’intercalaient dans le parcellaire cultivé ont quasiment disparues de même que les arbres isolés. Le paysage semble avoir changé d’échelle.

Des villages qui se sont étalés

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Les extensions urbaines des villages de Dessenheim et Fessenheim
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Ici à Fessenheim, les parcelles construites gardent, par leurs proportions allongées, trace de l’occupation agricole. L’habitation prend du recul par rapport à la rue mais le volume conserve l’orientation privilégiée dans le centre bourg. Fond street view

Les extensions urbaines ont considérablement développé l’enveloppe bâtie villageoise en comparaison avec la situation de 1830. Ainsi Fessenheim et Balgau forment aujourd’hui une continuité bâtie le long de la RD468.
Les extensions urbaines de la première moitié du XXe siècle sont caractéristiques de l’attachement encore présent à la ressource sol, privilégiant un processus de densification en centre bourg ou des constructions connectées au village le long des rues principales.

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Fessenheim, ilots début XXe - Fond IGN Geoportail
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Ici, à Fessenheim, les lotissements successifs sont venus entourer le centre du village, en « phagocytant » d’importantes emprises agricoles, redécoupées en parcelles carrées, desservies par de nouvelles voies. Les volumes, séquences d’entrée, clôtures, orientations,… s’affranchissent de l’organisation patrimoniale.

A partir de la seconde moitié du XXe siècle, l’éclatement urbain des villages de la Hardt génère de nouveaux paysages urbains qui n’entretiennent plus aucun lien avec les typologies urbaines héritées du village. Les villages se sont alors dilatés avec des couronnes pavillonnaires qui ont pris place sur le petit parcellaire de jardins et de vergers qui autrefois formait la ceinture villageoise. Les périphéries des villages sont aujourd’hui marquées ces opérations de lotissements qui côtoient les bâtiments agricoles et artisanaux.

Ces motifs urbains, crées de toute pièce dans une logique de rentabilité foncière, ne sont pas sans questionner sur les confrontations produites entre espaces bâtis et surfaces agricoles. Imaginé come facilement reproductible, ce modèle urbain s’affranchit des contraintes du site et génère une rupture très (trop) franche entre les dernières maisons du village et les champs.

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Fessenheim îlots lotissements


ENJEUX PAYSAGERS DANS LA HARDT

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Hardt bloc-diagramme des enjeux paysagers


Maintenir une diversité dans les paysages de grandes cultures du nord de la Hardt

Le nord de la Hardt, avant la Plaine d’Alsace, et l’est entre la Bande rhénane et la forêt, sont dédiés aux grandes cultures, majoritairement de maïs. Ces étendues proposent aujourd’hui des paysages relativement dénudés l’hiver. L’été et l’automne les maïs s’élèvent, coupant les vues moyennes sur le paysage. Tout élément de diversité est donc le bienvenu. Le maintien d’une diversité paysagère passe par la conservation et le renouvellement des arbres isolés, de bosquets, de vergers ou de fruitiers bordant les chemins, qui ensemble, modulent l’échelle du paysage et lui donnent des repères. Les abords des chemins, peuvent être le support de cette diversité et concilier desserte agricole et découverte de ces paysages. Leur aménagement est à coordonner avec la démarche Trame Verte /Trame Bleue [1].

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Maintenir une diversité dans les paysages de grandes cultures du nord de la Hardt

Quelques pistes d’actions envisageables
- Veiller à maintenir l’arbre dans le paysage. Replanter des arbres fruitiers isolés ou alignés le long des chemins ruraux.
- Maintenir un réseau de chemins agricoles sans culs de sac, surtout en périphérie des villages.
- Mettre en valeur les petits éléments qui jalonnent le territoire : arbre isolé, calvaire…
- Gérer les bosquets et leur lisière.

Soigner la qualité des bâtiments agricoles et de leurs abords

Dans la Hardt les nouveaux bâtiments agricoles sont positionnés en périphérie des villages, plus rarement en situation isolée dans les champs. Les nouveaux bâtiments agricoles construits sont en rupture avec les bâtiments anciens de par leurs volumes, leurs matériaux ou leur couleur, en raison des mises aux normes ou de l’évolution des techniques. Cela les rend très visibles dans ces paysages ouverts. Leur localisation et leur qualité architecturale (volume, couleur…), ainsi que l’aménagement de leurs abords sont également importants. Cet enjeu est également lié à l’aménagement des abords des villages (plantations, chemin, transition avec les champs). Une activité agricole perdure également au sein des villages dans les bâtiments « intra-muros » et constitue un atout qui participe à la vie des villages. Le maintien de l’activité agricole au sein des villages nécessite une adaptation maitrisée des vieux bâtiments et des dessertes à la taille des nouvelles machines.

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Soigner la qualité des bâtiments agricoles et de leurs abords

Quelques pistes d’actions envisageables
- Eviter les implantations trop visibles en entrée de village.
- Favoriser l’utilisation du bâti ancien pour limiter les implantations nouvelles en périphérie des villages.
- Privilégier des bâtiments de teinte sombre, plus discrets dans le paysage.
- Soigner l’architecture des bâtiments (volumes, matériaux), fractionner les volumes.
- Soigner l’entrée de la ferme. Aménager les entrées et les chemins d’accès.
- Replanter des arbres fruitiers isolés ou alignés le long du chemin d’entrée de la ferme et en périphérie des bâtiments.
- Planter aux abords des bâtiments pour faire une transition avec le paysage. Utiliser des essences locales adaptées au contexte.
- Installer les stockages dans des lieux discrets.
- Adapter l’aménagement urbain aux passages d’engins agricoles.

Valoriser les canaux

L’eau est rare dans le sol filtrant de la terrasse alluvionnaire de la Hardt. La forêt est d’ailleurs reconnue pour ses stations sèches d’un point de vue environnemental. Cet état a entrainé également des conséquences dans le paysage. Les canaux d’irrigation de la Hardt et des points de forage de la nappe ont été créés, ainsi qu’un réseau de rigoles d’amenée et de vannes. A cela s’ajoute les grandes perspectives de l’ancien et de l’actuel canal du Rhône au Rhin. Cette eau maitrisée et visible donne au paysage de la Hardt des atouts incontournables. Cette richesse paysagère liée à l’eau mérite une mise en valeur réfléchie à l’échelle du grand paysage : gestion de la végétation arborée, visibilité du tracé, accès et gestion des abords et des ponts, support de cheminement…Cela viendra également appuyer la démarche Trame Bleue/ Trame Verte [1] des liaisons écologiques.

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Valoriser les canaux

Quelques pistes d’actions envisageables
- Remettre le canal en contact avec le paysage environnant (gérer la végétation, effectuer des plantations d’alignements, dégager des vues depuis les ponts …) pour lui redonner un rôle principal dans le paysage.
- Retrouver des liens avec les villages proches.
- Trouver un vocabulaire simple et adapté pour les accès ou les stationnements, les haltes touristiques.
- Mettre en valeur les rigoles et les petits canaux d’irrigation qui offrent un fil d’eau à une échelle intime.
- Soigner les points de franchissements et leurs abords.

Mettre en valeur les lisières forestières

Toute la partie sud de la Hardt est occupée par un grand et long massif forestier. Au sein des vastes étendues cultivées qui l’entourent, la lisière périphérique de la forêt de la Hardt constitue une partie des horizons, bien visibles, formant une limite plus sombre.
Une fois la lisière franchie, le sous-bois offre un paysage forestier et intime bien différent. Toutefois lorsque les lisières bordant les voies forestières forment des murs végétaux trop opaques ou uniformes, les longues traversées forestières peuvent paraître monotones. Il est donc important de travailler les lisières forestières par une politique de plantation et de gestion adéquate (beaux sujets conservés, éclaircies des plantations, choix d’essence plus noble…).

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Mettre en valeur les lisières forestières

Quelques pistes d’actions envisageables
- Privilégier les boisements mixtes ou feuillus sur les lisières les plus visibles. Varier les essences sur les premiers rangs.
- Moduler les lisières pour apporter une diversité. Eviter une gestion homogène des lisières sur de longs linéaires.
- Modeler les plantations par des éclaircies pour favoriser la perméabilité visuelle des lisières.
- Préserver et dégager des arbres remarquables en lisière.
- Mettre en valeur les petits évènements : abords cours d’eau forestiers et des ponts, croisement...
- Aménager les carrefours forestiers. Dégager une clairière autour de quelques carrefours forestiers.

Soigner les accès à la forêt

Compte tenu des fortes densités urbaines proches et de l’absence d’autres massifs forestiers à proximité, la forêt de la Hardt constitue un point d’attraction fort et concentre une bonne partie de la fréquentation de détente de la partie sud du Haut-Rhin. Les voies vertes, les canaux, ou les chemins qui la traversent en constituent des vecteurs incontournables.
L’aménagement des accès et des aires de stationnement doit prendre en compte l’ambiance particulière de ces paysages forestiers. L’intérêt est de favoriser l’accessibilité au massif en le mettant en valeur d’un point de vue paysager, tout en préservant les milieux naturels.

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Soigner les accès à la forêt

Quelques pistes d’actions envisageables
- Intégrer les aménagements dans des clairières ou des sous-bois.
- Limiter l’artificialisation des surfaces de stationnement et des chemins, rechercher une sobriété dans les aménagements.
- Réduire les panneaux de signalisation et d’information au strict nécessaire.
- Préserver et dégager des arbres remarquables en lisière.
- Mettre en valeur les carrefours par des ouvertures, une gestion spécifique, la mise en valeur de sujets remarquables.

Maitriser les extensions villageoises / Soigner le tour des villages

L’axe de la RD 68 relie une succession de villages encore bien individualisés au sein d’un paysage ouvert de grandes cultures. Tout développement périphérique est donc très visible et participe à l’image de chaque commune. La façon dont les nouvelles habitations sont organisées entre elles et connectées au reste du bourg conditionne également la qualité des lieux. L’idée est de créer de véritables quartiers plutôt que des lotissements stéréotypés sans aucun lien avec la logique du village. Parfois les extensions urbaines s’étendent également sur les anciennes ceintures vertes (vergers, prairies) mettant ainsi les nouvelles habitations directement au contact des cultures. La prévision d’une transition (tour de village) permet d’améliorer le cadre de vie des habitants afin de d’éviter les confrontations difficiles et de créer un espace de détente fréquenté en complément des villages denses.

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Maitriser les extensions villageoises / Soigner le tour des villages

Quelques pistes d’actions envisageables
- Préserver la silhouette groupée des villages. Maîtriser l’étalement urbain.
- Agrandir le bourg en prolongeant la logique de son plan de composition.
- Prôner un développement durable et économe de l’espace dans les documents d’urbanisme.
- Mailler les nouveaux quartiers avec des rues et non des impasses.
- Se développer autrement que par l’étalement urbain. Redynamiser l’habitat en centre bourg.
- Respecter la hiérarchie des masses bâties et du clocher. Eviter les juxtapositions ou les vis-à-vis malencontreux pour les constructions ou les zones de développement.
- Etre vigilant sur l’emplacement, les volumes et les couleurs des nouvelles habitations.
- S’inspirer du bâti existant et favoriser l’alignement des façades ou des pignons et la mitoyenneté qui font le charme des centre-bourgs ruraux.
- Maintenir les coupures vertes entre les villages pour éviter l’effet agglomération.
- Veiller à l’impact paysager des bâtiments d’activité en périphérie.
- Soigner les périphéries des villages : plantations, chemin de tour de village, abords du cimetière.
- Préserver les ceintures de cultures diversifiées autour des villages : prés vergers, cultures maraîchères, jardins périurbains, petites parcelles cultivées…
- Préserver un maillage de chemins suffisamment dense en périphérie des villages.

Mettre en valeur les espaces publics / Affirmer les entrées

Dans les espaces ouverts de la Hardt, le bourg et sa périphérie sont bien identifiables dans le paysage et visibles de loin. L’entrée dans le bourg et la qualité des espaces publics participent fortement à l’image de la commune. L’entrée doit apporter un changement d’échelle après un parcours routier. La route fait place aux rues et aux places dont la qualité d’aménagement est importante pour le cadre de vie des habitants. Les espaces publics, comme les places, sont des points stratégiques à soigner pour conserver le cachet du bourg et sa convivialité. Les aménagements pour améliorer le cadre de vie des habitants doivent conserver une simplicité pour conserver l’harmonie et le charme des villages.

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Mettre en valeur les espaces publics / Affirmer les entrées de bourg

Quelques pistes d’actions envisageables
- Aménager les entrées de bourg avec simplicité pour marquer la transition de la route à la rue.
- Utiliser les alignements d’arbres pour structurer l’espace.
- Valoriser les abords des cours d’eau dans les villages et les bourgs.
- Trouver un vocabulaire simple mais de qualité pour les aménagements des espaces publics.
- Mettre en valeur les places. Trouver un équilibre entre stationnement et convivialité des espaces publics.
- Prévoir dans toutes extensions urbaines des espaces publics structurants de qualité.
- Privilégier l’utilisation de matériaux locaux dans les aménagements.

REPERES BIBLIOGRAPHIQUES

Paysages
- Gerplan du pays de Brisach. 2007-2012 - Sivom du pays de Brisach- Conseil général du Haut Rhin
- Etude paysagère du Haut-Rhin. 1991 - DAT Conseils, J. Sgard, D. Jarvis, Terra Plan- DREAL Alsace

Géographie
- l’Alsace et les Vosges. Géologie, milieux naturels, flore et faune. 1998 -Yves Sell- ed.Delachaux et Niestlé

Urbanisme et architecture
- Alsace, l’architecture rurale française. Ouvrage de Marie-Noëlle Denis et Marie-Claude Groshens. Editions A Die. 1999
- Site Internet : Alsace, la maison alsacienne : www.encyclopedie.bseditions....

[1] La Trame verte et bleue est une mesure phare du Grenelle Environnement qui porte l’ambition d’enrayer le déclin de la biodiversité au travers de la préservation et de la restauration des continuités écologiques. Cet outil d’aménagement du territoire vise à (re)constituer un réseau écologique cohérent, à l’échelle du territoire national, qui permette aux espèces animales et végétales, de circuler, de s’alimenter, de se reproduire, de se reposer,... En d’autres termes, d’assurer leur survie, et permettre aux écosystèmes de continuer à rendre à l’homme leurs services.
Les continuités écologiques correspondent à l’ensemble des zones vitales (réservoirs de biodiversité) et des éléments qui permettent à une population d’espèces de circuler et d’accéder aux zones vitales (corridors écologiques). La Trame verte et bleue est ainsi constituée des réservoirs de biodiversité et des corridors qui les relient.