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Strasbourg, siège des grands équipements de la province
Lors du rattachement de l’Alsace Lorraine à l’Allemagne, Strasbourg devient capitale du Reichsland d’Alsace-Lorraine. A l’image de nombreuses villes alsaciennes, un plan d’urbanisation est lancé pour l’extension et la restructuration de la ville. Strasbourg a la particularité d’avoir connu l’un des plus vastes plans d’urbanisation en Alsace et de n’avoir pas été détruit par les bombardements lors de la deuxième guerre mondiale. Il subsiste alors aujourd’hui un parfait ensemble urbain et architectural allemand qui a traversé le temps. On estime que la surface de la ville se développa de 230 à 620 hectares durant la période de l’Annexion. Ce n’est pas un quartier, mais des quartiers allemands qui voient le jour à Strasbourg. Enrichis par les équipements nécessaires au fonctionnement d’une capitale de région, ces quartiers témoignent aujourd’hui de la démarche urbaine commune aux villes alsaciennes de cette période.
- Ce plan de la ville de Strasbourg, édité en 1896, montre les extensions urbaines réalisées autour de l’ellipse historique de la ville : au-delà de l’Ill, le quartier gare avec ses rues concentriques, le quartier des équipements institutionnels au Nord-Est avec son grand axe (l’Avenue de la liberté) et les quartiers Nord intégrés dans le plan de composition global de la ville. Source CRDP Alsace
Historiquement implanté entre les bras de l’Ill, la ville de Strasbourg déborde de ces frontières naturelles à l’Ouest par l’arrivée de la ligne de chemin de fer Paris-Strasbourg, et à l’Est en direction du Rhin au bord duquel s’installe le port autonome. Ces nouveaux quartiers sont reliés entre eux par un réseau de tramway électrifié en 1894. Les fortifications de la ville (surtout en partie Sud et Sud-Est) subsistent jusque dans les années 1910 où une campagne de démantèlement est lancée afin de pouvoir plus largement urbaniser la ville. Les premiers plans d’urbanisation allemands font état d’une enceinte rénovée après 1870 sur un plan polygonal simplifié dont la citadelle occupe l’extrémité Est. L’enceinte de Strasbourg était alors, avec celle de Cologne, la plus importante des enceintes urbaines édifiées en Allemagne (des vestiges de ces fortifications sont d’ailleurs visibles dans la ville, dans le parc de la citadelle au Sud de la ville).
On peut citer nombre de quartiers dits « quartiers allemands » à Strasbourg :
le quartier de la gare organisé par une ceinture de boulevards (boulevard du président Wilson jusqu’au boulevard de Lyon). La gare de Strasbourg est reconstruire en 1883 sur les anciennes fortifications face à la place de l’Hemicycle. Le bâtiment long de quelques 130 mètres est bâti sur un style néo-renaissance avec sa façade ornée d’imposantes arcades contenant des baies jumelées.
le quartier des institutions impériales organisé selon deux axes perpendiculaires à savoir l’avenue des Vosges (qui intègre la ceinture de boulevard de la ville) et l’avenue de la Paix qui permet de sortir de la ville.
- L’ensemble constitué depuis la place de la République jusqu’au jardin botanique rassemble nombre de bâtiments institutionnels. La monumentalité s’exprime à travers la composition des espaces publics de ce quartier. Source geoportail
L’architecte de la ville imagine alors un ensemble monumental de la place de la République à la place de l’Université, devenant le symbole de la « Neustadt » de Strasbourg. Autour de la place de la République, espace public circulaire, cinq édifices majeurs se succèdent.
- Le palais du Rhin, ancien palais impérial forme la fin de la perspective à l’ouest depuis la place de la République. Cet ensemble urbain et architectural marque le renouveau du secteur Nord de la ville qui double ainsi sa superficie à l’articulation avec la ville historique et les bords de l’Ill. Source Internet « carte postale ancienne »
Le palais du Rhin, ancien palais impérial, construit entre 1883 et 1888 pour accueillir l’empereur lors de ses visites à Strasbourg, marque le rattachement de la ville à l’Allemagne, et s’inscrit dans un programme de rénovation urbaine de grande ampleur. Le théâtre national de Strasbourg, construit entre 1888 et 1899, qui accueille dans un premier temps les sessions de la Délégation régionale. En 1911, il devient le Parlement d’Alsace-Lorraine jusqu’à la fin de la première guerre mondiale. La bibliothèque nationale et universitaire, la Préfecture du Bas-Rhin et la Trésorerie générale, sont autant de bâtiments à vocation publique qui cadrent la place sur trois de ses côtés, la place de la République jouxtant un bras de l’Ill sur son quatrième côté. Dans le plus pur style néo-renaissance germanique, les bâtiments s’organisent en fonction de l’espace public. L’espace public n’est plus pensé comme une résultante de la structure bâtie, mais s’impose au projet. Les rues, les places, la végétation (arbres d’alignement, en bosquets), les parcs sont autant d’éléments de composition pour « fabriquer la ville », et sont démonstratifs du pouvoir en place. Le recours à la statuaire (sur socle, isolé) est aussi un élément qui s’insère dans cette nouvelle trame d’espaces publics, généreuse et monumentale.
Depuis le Palais du Rhin, la perspective de l’Avenue de la Liberté s’ouvre sur la place de l’Université fermée par le Palais de l’Université. Bâtiment de style néo-renaissance (d’inspiration italienne), construit entre 1879 et 1884, il constitue l’édifice majeur de la nouvelle université de Strasbourg en 1871. L’ensemble formé par le Palais de l’Université, le jardin botanique et l’Institut de Botanique marque à nouveau la symbolique de la composition urbaine, à la fois parc urbain, lieu de culture et de science, poumon vert pour la ville.
L’urbanisme allemand du début du XXe siècle est porteur d’une symbolique et d’une monumentalité remarquable. A l’échelle de la ville alsacienne, ce sont des quartiers entiers qui ont été bâtis, et l’espace public résultant de ces quartiers est une composante indiscutable des paysages urbains.