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Le Val d’Argent ou la fièvre urbaine de la Mine

C’est durant le XVIe siècle que certaines vallées vosgiennes connaissent un formidable développement économique. Les spécificités paysagères vont, là encore, déclencher un phénomène urbain particulier autour de l’exploitation des mines.
La vallée de Sainte-Marie-aux-Mines au temps de l’âge d’or de l’argent. Dès le Xe siècle, la vallée exploite ses filons argentifères (encore une ressource exploitée par les pouvoirs religieux locaux), mais grâce à de nouvelles techniques de creusement et le recours massif à l’immigration de Bourguignons, de Souabes, de Lorrains et de Bavarois, c’est l’ensemble de la vallée de Lièpvre qui connaît la prospérité économique. Quelques 80 mines de plomb, de cuivre et d’argent sont alors exploitées et dans les années 1550, c’est environ 3,5 tonnes de métaux qui sont extraits chaque année.

Un choc urbain

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Sainte-Marie-aux-Mines. La pharmacie de la tour, ancien siège de l’administration minière au milieu du XVIe siècle Elle se situait alors dans la partie alsacienne de Sainte-Marie-aux-Mines, sur les terres du sire de Ribeaupierre.

La vallée de Sainte-Marie-aux-Mines n’est jusqu’à alors qu’une vallée isolée des Vosges, coupée en deux dès le XIIIe siècle par les pouvoirs locaux le long du cours d’eau de la Liepvrette. L’arrivée massive d’immigrés, de nombreux marchands et commerçants dans ces vallées vosgiennes est déclencheur d’un développement urbain considérable qui a profondément marqué le paysage.
Les villages de la vallée se structurent à proximité des lieux d’exploitation : près de 1200 maisons sont bâties à Sainte-Marie-aux-Mines, l’eau est canalisée et acheminée jusque dans ces nouveaux centres urbains, des quartiers de mineurs côtoient le centre administratif qui connaitront tous au XIXe siècle une seconde jeunesse par l’arrivée en masse de l’industrie textile. Du passé minier, il reste aujourd’hui quelques traces d’une architecture civile telle que la tour des Mineurs à Echery ou les maisons à tourelles de Sainte-Marie-aux-Mines. Typique du XVIe siècle, ces maisons servaient de demeures aux cadres de l’administration minière.

Un déclin temporaire

Les mines sont progressivement abandonnées au début du XVIIe siècle à cause des troubles engendrés par les conflits territoriaux ainsi que l’épuisement des gisements. Mais, il en résulte une trame urbaine de villages, entre Sainte-Marie-aux-Mines, Sainte-Croix-aux-Mines, Liepvre,… qui survivra à l’usure du temps, ainsi que des ouvrages (galeries, canaux), qui seront autant d’éléments favorisant l’installation au XIXe siècle des industries textiles.

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Le temple réformé (rue du Temple à Sainte-Marie-aux-Mines) datant de 1634 (le clocher ne date que du début du XIXe siècle) constitue l’un des plus vieux temples français qui nous soit parvenus. Cet édifice est témoin de la partition de la commune en deux (côté lorrain et côté alsacien), une étant catholique (partie septentrionale du ruisseau de Liepvrette- côté lorrain), l’autre partie étant multiconfessionnelle.

La situation géographique singulière des vallées vosgiennes (présence importante du bois et de l’eau) est, au long de l’histoire de l’Alsace, porteur de dynamiques économiques, culturelles liées à l’exploitation des ressources locales au service de logiques industrielles. Les paysages se trouvent, à chaque époque industrielle, bouleversés par ces chocs techniques et démographiques qui remettent en cause les logiques de gestion des espaces naturels (agriculture, défrichement, gestion de la forêt) jusque dans leur propre existence.