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Les voies consulaires, premier réseau routier d’Alsace

La table de Peutinger, appelée aussi « carte des étapes de Castorius » permet d’imaginer l’ampleur et la complexité du réseau routier de l’Empire romain. Les voies principales nous renseignent sur les flux de biens et de marchandises sur la partie Alsace, il est intéressant de constater que ces tracés ont survécu dans leur ensemble aux assauts du temps. L’œil averti pourra d’ailleurs repérer sur une carte IGN la préexistence d’une voie romaine à l’emplacement actuel d’une route, d’une autoroute ou bien d’un chemin agricole. Dans les villes alsaciennes, on peut ainsi présumer de la présence d’une voie romaine au travers des noms de rues qui contiennent l’appellation « hohe strass, voie ou rue haute ».

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Carte des étapes de Castorius ou Table de Peutinger, centrée sur l’Alsace et le Rhin. La carte est ici orientée avec l’Est en haut. On peut y reconnaitre les Vosges (Silva Vosagus), Brumath (Brocomagus), Strasbourg (Argentorate, représenté par une construction), Horbourg (Argentovaria), Kembs (Cambete), Bourgfelden (Arialbinium), Kaiseraugust (Augusta Rauracorum, représenté par une construction)

La table de Peutinger conservée à Vienne, représente la carte du monde romain à la fin du IVe siècle. D’une longueur totale de presque 7m, le document est un ensemble de 11 parchemins qui montre près de 200 000 km de routes, mais aussi l’emplacement de villes, mers, fleuves, forêts, chaînes de montagnes. Il figure les routes principales et les cités qu’elles reliaient : on y trouve, entre autres, le massif des Vosges, ce qui en fait la plus vieille représentation de cette montagne.

En fait, les voies romaines sont de trois types :

- les viae publicae, les grandes voies de l’Empire qui sont alors les artères principales du réseau routier permettent de relier les grandes cités entre elles. Ces routes consulaires (qui portent d’ailleurs le nom de la personne qui a porté le projet de sa construction) permettent aux troupes de se déplacer rapidement d’un point à l’autre de l’Empire (entre les camps fortifiés),

- les viae vicinales qui permettent de relier les villes moyennes entre elles et qui se connectent souvent aux viae publicae. Ces routes de seconde classe (les chemins de grande communication) servent davantage au transport du bétail et des marchandises courantes.

- enfin les viae privatae qui relient les grands domaines agricoles et qui ne sont pratiquées que par le propriétaire des lieux.

La plupart des voies romaines sont simplement rendues circulables par un matériau stabilisé (lit de sable), sauf dans des situations de passages difficiles (chemin escarpé, passage fréquent, entrée de ville,…) où la voie est alors recouverte de grès (dalles de pierre avec joints en terre) ou de pierres concassées.

Les voies romaines en Alsace

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L’Alsace romaine. CRDP Alsace

L’inventaire des voies romaines de la région alsacienne, relève pour une bonne part d’hypothèses tant certains itinéraires posent encore question aujourd’hui, mais, deux éléments sont à noter :
- les principales cités étant situées dans la plaine du Rhin, les voies structurantes vont suivre cet axe naturel. Ainsi, une voie directe existait le long du Rhin entre Kembs et Strasbourg (Argentoratum). Une autre voie importante longeait les piémonts vosgiens entre Saverne et Belfort (la future route des Vins…).
- Le massif des Vosges est franchi par trois axes majeurs : au sud par le col de Bussang, au nord par le col de Saverne et au centre par le massif du Donon (le chemin d’Allemagne entre la Moselle et le Bas-Rhin permet encore de voir des traces de voie pavée). Si les Vosges sont délicates à franchir), leur traversée est indispensable pour le trafic des marchandises vers le restant de la Gaulle.
Les voies romaines, stratégiques, ont eu des évolutions diverses : celles qui empruntaient des passages naturels évidents (cols vosgiens, bande rhénane) ont été recouvertes successivement par les voies modernes (autoroutes, chemins de fer), et celles qui reliaient des centres dont les intérêts n’étaient pas liés à la réalité sociale et économique des régions traversées sont tombées en déshérence au travers des âges. Les voies consulaires correspondent à une intelligence de structure du territoire en parfaite connaissance des lieux. Elles ont été toutes ou presque préservées et, à quelques poteaux et revêtement près, sont restées les mêmes. Nos routes actuelles se sont très souvent substituées à des tracés anciens.